Les services publics traditionnels sont menacés de démantèlement
complet. L’abaissement de la qualité de ces services et leurs
dysfonctionnements fréquents sont le résultat d’une volonté
politique : ils nous préparent à l’acceptation de privatisations successives,
préalablement programmées par l’Accord général sur le commerce
des services (AGCS).
Ce mouvement de privatisation s’accélère depuis la « fin du communisme
» : l’État-Providence que l’on prenait pour un acquis durable
et une protection inexpugnable s’est brisé, comme le Mur de Berlin en
1989. Les solutions par le biais du libre marché sont désormais présentées
comme les plus démocratiques possibles.
Depuis une dizaine d’années, chaque nouvelle atteinte aux acquis
sociaux comme aux structures publiques voit défiler, manifester et pétitionner
force fonctionnaires, syndicats, représentants de partis, encartés
ou non encartés, individus, usagères et usagers… en France comme
ailleurs. Pendant la campagne préalable au référendum sur la ratification
du projet de Constitution européenne, au printemps 2005, on est
entré dans le nouveau chapitre des SIEG (services d’intérêt économique
général1), le débat s’est généralisé, les résistances au démantèlement
se sont multipliées. Il ne fait aucun doute que la situation est de
plus en plus dramatique, la logique néolibérale s’appliquant à tout,
obligeant tout à être concurrentiel. Les acquis que nous allons perdreétaient une base de combat. Mais rien de ce qui nous est « dû » n’est
jamais garanti : ce sont les combats de la base qui préservent les acquis,
jamais les lois ni les réglementations,
Des décennies d’acceptation générale (au sein même de la puissance
publique) de la logique productiviste, après des décennies de
mise à sac effrénée des ressources terrestres et du vivant au nom du
progrès social – ici et si peu ailleurs –, au nom des avancées technologiques,
scientifiques et militaires – ici plutôt qu’ailleurs –, et nous irions
ensuite manifester ? Pour en préserver les bénéfices secondaires, malgré
toutes les destructions et la souffrance sociale engendrées par cette
tutelle économique et politique ?
Les services publics : ça sert aussi à
faire la guerre et les centrales nucléaires !
Ce numéro de Réfractions interroge nos contradictions, nos hésitations
autour de l’organisation de services en commun, ce qui pose la
question du rôle de l’État minimum. Que pourrait être le politique
comme espace public, en dehors de l’État ? Dans les services publics,
tout n’est pas équivalent : même les libéraux demandent à l’État d’assumer
certaines infrastructures fondamentales. Nous avons devant
nous un projet – européen, en l’occurrence – qui va restreindre l’espace
public. Le droit de résistance civique sera interdit.
Nous ne pouvons donner de solution pour la situation future. Nous
pouvons dire : nous voulons ceci, nous trouvons ça… mais sans bouleversement
global de la société, il n’y a pas d’espace pour ce que nous
voulons faire.
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