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Droit paysan Éléments d’introduction au mouvement
Article mis en ligne le 15 mai 2015
dernière modification le 15 mai 2016

par ps
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Jean-Jacques Gandini :

Droit paysan est à l’heure actuelle un mouvement encore expérimental puisqu’il n’a même pas deux ans d’existence, et plutôt régional puisqu’il est implanté essentiellement en Languedoc-Roussillon et dans les départements limitrophes de l’Ariège d’un côté, de l’Ardèche, de la Loire et de la Haute-Loire de l’autre. Ses promoteurs sont principalement des néo-ruraux mais pour la plupart installés depuis quinze-vingt ans et insérés dans le tissu social. Plutôt éleveurs d’ovins ou de caprins, ou maraîchers, certains sont encore à la Confédération paysanne, d’autres en sont partis, craignant une dérive à la fois politique –
surfer sur l’« effet Bové » pour tailler des croupières à la FNSEA – et économique – volonté de promouvoir les produits AOC à destination d’une clientèle « éclairée » et aisée. Ils se situent dans une démarche de solidarité internationale envers toute la planète, en luttant pour le respect des droits des peuples et des individus, et prônant un mode de fonctionnement libertaire : démocratie directe, organisation en réseau de groupes autonomes, assemblée générale souveraine pour les prises de décisions.
La philosophie du mouvement, c’est le droit à un toit et à une terre, légitimant les occupations en faisant prévaloir le droit d’usage sur le droit de propriété, mais sachant également utiliser une législation existante méconnue. Et l’installation n’est pas réservée aux seuls « exploitants agricoles » mais aussi aux exclus économiques (RMIstes, chômeurs, SDF, nomades, etc.) à la recherche d’une vie en milieu rural, avec pour objectif de promouvoir de nouvelles formes d’existence hors des normes productivistes actuelles et avec le souci de la préservation de notre environnement naturel.

Dans le cadre du réseau, il s’agit de réhabiliter les anciens chemins de carriage, réservés aux marcheurs, attelages, montures et troupeaux, reliant les régions et serpentant de commune en commune, permettant de se dispenser de la voiture sans en pâtir. Ces voies piétonnes seront des voies de communication – au plein sens du terme, c’est-à-dire d’échanges et de rencontres – appelées à devenir les axes d’un développement durable en milieu rural.

Dans le cadre du droit au logement, qui est un droit fondamental et reconnu d’ailleurs comme tel par la Constitution, le squat de bâtiments existants laissés à l’abandon est légitime. Est également encouragée l’autoconstruction, avec utilisation de matériaux locaux et recherche de l’autonomie énergétique, en s’aidant par exemple des techniques mises au point par les bio-architectes et les maçons en bio-construction de l’université d’Écologie appliquée et solidaire 1, permettant d’abaisser le prix de revient dans des proportions de plus de 1 à 10 par rapport à une construction « classique ».

Dans le cadre du droit à la terre, l’usage de l’espace doit prévaloir sur la privauté du droit de propriété. Actuellement, le territoire agricole non cultivé représente trois millions d’hectares, soit 50 % de plus qu’il y a vingt ans. Or en consultant le cadastre et le fichier des Domaines, on peut prendre connaissance des terrains libres ou présumés vacants. Outre l’occupation de fait selon la situation et les rapports de force locaux, on peut également utiliser la législation applicable en matière de « terres incultes », qui remonte à une loi de février 1942 2, et élargie depuis par la loi 85-30 de janvier 1985 aux terres « manifestement sous-exploitées ». La possibilité de dénoncer cet état d’inculture s’effectue selon des modalités visées dans le Code rural qui, une fois la procédure menée à bien, permettent d’obtenir du propriétaire un bail d’une durée de dix-huit ans minimum, renouvelable par période de neuf ans, aux conditions et prix fixés conformément aux dispositions relatives au fermage.
Dans les cas où il sera procédé à l’achat de terres, afin de casser la spéculation foncière et la logique de la propriété privée, il est proposé de procéder à l’acquisition collective de terres par le biais de la « tontine », système d’assistance mutuel dans lequel x personnes cotisent périodiquement jusqu’à hauteur d’un certain montant (10 000 F par exemple) qui va permettre à chacun(e) de profiter à tour de rôle de la cagnotte pour s’installer selon des modalités prévues par l’association Terre commune 3 qui a été créée à cet effet.

Jean-Jacques Gandini

1. UEAS, Le Chabian, 30700 Aigaliers. Voir les illustrations du numéro 4 de Réfractions.
2.Eh oui, il s’agit bien d’une loi vichyste, reprise depuis périodiquement par les lois d’orientation agricole.
3. C/o Jacques Voisin, 14, rue Saint-Marc, 11300 Pauligné.




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