Réfractions, recherches et expressions anarchistes
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Article mis en ligne le 7 juillet 2007
dernière modification le 7 juillet 2008

Ecouter la présentation de ce numéro faite par Annick Stevens et Eduardo Colombo dans le cadre de l’émission Chroniques Rebelles sur Radio Libertaire

Chroniques Rebelles Le site

QUESTION DES PLUS ANCIENNES, problème central de la philosophie
politique, le pouvoir n’a pas cessé de hanter les esprits ; il a obsédé les
puissants et révolté les partisans de la liberté.

Le pouvoir est un fait politique. Et partout il se présente enveloppé de
sacralité, mais aussi de raisons, de légitimations, de justifications pour se
rendre acceptable. Nu, il est effroyable et obscène. Ces habillages ont toujours
nécessité démystification et critique.

Aujourd’hui nous vivons une période où le néolibéralisme conquérant
occupe sans partage le terrain. Quels effets cet envahissement a-t-il produit
sur la conception du politique et sur les théories du pouvoir politique ? En
particulier, on pourrait se demander si les théories apparemment les plus
critiques ou les plus contestataires ne se conforment pas à l’imaginaire établi.

Réfractions a voulu interroger le pouvoir à notre époque, et ouvrir un
espace de débat autour de l’une de ces théories qui paraît avoir du charme,
être dans l’air du temps et qui séduit nombre d’intellectuels : « la théorie du
pouvoir » de Michel Foucault. De même, cet air du temps néolibéral nous
incite à une lecture à nouveaux frais de l’idée de servitude volontaire théorisée
par La Boétie et trop souvent galvaudée.

Cette problématique nous a amenés, comme naturellement, à la question
de la place du politique et au constat de la dilution du conflit à l’intérieur du
bloc néolibéral. Il s’agit dans ce numéro d’approfondir la façon dont la pensée
politique contemporaine, théoriquement centrée sur l’idée de la division
sociale depuis les travaux sur le totalitarisme, transforme cette notion en
consensus sur l’ordre social dans le cadre d’un pluralisme bien compris,
renvoyant la conflictualité hors du champ politique, réduisant celui-ci à la
dimension juridique de la garantie des droits. La conséquence en est aussi
bien sûr le congé définitif donné à toute idée et tout imaginaire de la
révolution.

Il nous est apparu évident qu’entre ces deux questions se profilait un
troisième terme : la question du sujet politique, et plus largement la question
de l’agent de l’action, tellement son élision du discours théorique semblait
s’adapter aux conditions de l’ordre dominant, et modifier en profondeur la
compréhension du pouvoir politique ainsi que la représentation de la
conflictualité.

Nous voyons apparaître, alors, un discours libéral dominant qui, dans la
tradition de Benjamin Constant, produit et enregistre à la fois l’idée de fin du
politique. Un sujet qui se dérobe, le politique enfoui dans une société sans
divisions ni conflits, produisent cette « friabilité des sols » qui laisse sans appui
l’action collective, et ouvre la place à l’opinion publique qui, comme il a été dit,
n’est plus que « l’opinion des sans opinion », manipulée par des politiciens,
des sondeurs et les mass media.

C’est à déjouer ces pièges mortifères que veut s’essayer ce numéro. Mais
nous savons bien que « l’idée surgit de l’action et doit revenir à l’action, à
peine de déchéance pour l’agent » (Proudhon, De la justice dans la Révolution
et dans l’Église). On n’oubliera donc pas d’ajouter l’analyse de différentes
expériences de révolte, dans deux dimensions : l’une, de réflexion sur la
réappropriation de la capacité politique de décision, l’autre, plus concrète,
sur des mouvements sociaux récents qui mettent en scène cette
réappropriation - le zapatisme -, ou des événements plus ambivalents,
comme la rébellion des banlieues.

La rubrique Transversales prolonge quant à elle la réflexion sur le pouvoir,
dans la littérature et dans l’histoire.

La commission de rédaction


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le 9 juillet 2007