La conception de ce numéro de Réfractions a été traversée par une incompréhension que nous avons eu du mal à nommer. À quelques semaines de l’échéance, nous avons (je pense) réussi à mettre les choses à plat, et à comprendre les différentes postures des membres du comité de rédaction. Cet article tente d’expliciter mon point de vue. Lorsqu’on me proposait de réfléchir à un avenir ultra-technologique et à la manière dont il questionnait l’anarchisme, je comprenais les enjeux mais j’y réfléchissais en traînant les pieds. Je renvoyais vaguement à PMO, passés maîtres dans la critique du système technique et de ses méthodes d’acceptation par les masses, ou je proposais de relire Ellul, Mumford, Sale ou Charbonneau, mais pourtant sans m’y plonger moi-même. Bref, je n’y croyais pas. Et je ne crois toujours pas à la matérialisation de cet avenir ultratechnologique. Certes il est dans une certaine mesure déjà là (affaire Snowden, puçage des animaux d’élevage, hégémonie Facebook, lunettes Google, invasion d’iPhone et de tablettes, etc.), mais il n’a pas d’avenir. Il s’effondrera bien avant, c’est une évidence.
Je n’ai compris que très tard que ce n’était une évidence pour personne. Cet article tente de mettre à jour ce décalage entre ceux qui croient à cet avenir du progrès technique (inéluctable ou choisi, peu importe) et ceux qui n’y croient pas ; entre les cornucopiens et les catastrophistes ; entre les fans de high-techs et ceux qui investissent dans les low-techs.