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Irène Pereira
Syndicalisme d’action directe et illégalité, aujourd’hui
Article mis en ligne le 2 novembre 2010
dernière modification le 2 décembre 2010

À l’heure où l’anarchisme redevient une notion utilisée par le
gouvernement, propagée à travers les médias, pour entretenir
une politique de la peur [1], il apparaît important de revenir sur la
question des rapports entre anarchisme, illégalité et violence.
Pour cela, je vais partir de l’étude d’un mode d’engagement militant
dans lequel sont investis un certain nombre de militants anarchistes, à
savoir le syndicalisme. En effet il existe, depuis le début de l’histoire du
syndicalisme d’action directe, un lien étroit entre cette forme de
syndicalisme et l’anarchisme [2].

Je vais m’attacher plus particulièrement à effectuer un certain
nombre de clarifications et à étudier des caractéristiques du renouveau
contemporain de la contestation.Toute action directe est-elle illégale ?
L’action directe est-elle nécessairement violente ?

Une fois ce travail effectué, je souhaite étudier la question des
rapports entre action directe, illégalité et non-violence dans le
syndicalisme d’action directe à l’heure de ce que certains sociologues
appellent le renouveau de la contestation [3]. Mon interrogation porte
sur le sens que l’on peut donner à un
certain nombre de conclusions qu’ont fait
apparaître les études sociologiques sur le
militantisme contemporain : la tendance
à privilégier une cohérence entre les
moyens et les fins, la tendance à
désapprouver l’usage de la violence
physique tout en étant prêt à effectuer
des actions illégales [4].

J’appuierai ma réflexion théorique sur
mon expérience et l’enquête ethnographique
que j’ai menée depuis 2006
dans le cadre de mon militantisme au
sein du syndicat Sud Culture Solidaires.
Cette étude s’appuie principalement sur
des observations participantes, mais aussi
sur des entretiens.
Action directe, illégalité et violence
Pierre Besnard, dans l’article « action
directe » de l’Encyclopédie Anarchiste,
définit ainsi cette dernière :
Action individuelle ou collective ; exercée
contre l’adversaire social par les seuls
moyens de l’individu ou du groupement.

L’action directe est, en général, employée
par les travailleurs organisés ou les
individualités évoluées par opposition à
l’action parlementaire, aidée ou non par
l’État. L’action parlementaire ou indirecte
se déroule exclusivement sur le terrain
légal par l’intermédiaire des groupes
politiques et de leurs élus. L’action directe
peut être légale ou illégale. Ceux qui
l’emploient n’ont pas à s’en préoccuper.
C’est avant tout, et sur tous les terrains, le
moyen d’opposer la force ouvrière à la
force patronale. La légalité n’a rien à voir
dans la solution des conflits sociaux. C’est
la force seule qui les résout. L’action
directe n’est pas cependant nécessairement
violente, mais elle n’exclut pas la
violence. Elle n’est pas, non plus, forcément
offensive. Elle peut parfaitement
être défensive ou préventive d’une
attaque patronale déclenchée ou sur le
point de l’être, d’un lock-out partiel ou
total, par exemple, déclaré ou susceptible
de l’être à brève échéance [5].

Ce qui caractérise donc l’action directe en
soi, selon Pierre Besnard, c’est le refus de
la démocratie représentative comme
moyen d’action politique. Le syndicalisme
révolutionnaire définit plusieurs
types d’action directe : la grève, le
sabotage, le boycott et le label. On peut
constater que la grève, dans notre
législation, si elle demeure une forme
d’action directe, est légale dans un
certain nombre de ces formes. Néanmoins,
il existe des formes de grève
illégales, telles les grèves sauvages.
L’action directe n’exclut pas non plus
la violence physique que ce soit contre les
biens ou les personnes. Mais, comme le
souligne Pierre Besnard, l’action directe
n’est pas nécessairement violente. Il
existe des formes d’action directe qui
sont illégales et non-violentes. On
qualifierait aujourd’hui ces formes
d’action de désobéissance civile [6].

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