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Alternative libertaire est née en 1991, quelque temps après la chute du mur de Berlin, et en pleine mobilisation contre la guerre du Golfe. Elle se proposait de « répondre à une période historique nouvelle » en renouvelant le combat libertaire. Elle s’est constituée à l’issue d’un processus de convergence associant des libertaires inorganisés et les militant(e)s du collectif Jeunes libertaires et de l’UTCL (Union des travailleurs communistes libertaires). L’élaboration spécifique d’AL commence avec l’adoption, en mai 1991, d’un Manifeste pour une alternative libertaire qui demeure le texte de référence de cette organisation. AL s’inscrit dans la continuité de l’UTCL née en 1976. Elle en reprend l’apport théorique (notamment l’élaboration dans les années 80 d’un Projet communiste libertaire) ainsi que les évolutions : rupture avec un certain « ouvriérisme », dépassement du plateformisme. AL recherche une synthèse sur des bases contemporaines des acquis du communisme libertaire, de l’anarchosyndicalisme, du syndicalisme révolutionnaire, en vue d’élaborer un nouveau projet libertaire, y compris en puisant dans des apports qui ne s’inscrivent pas dans des filiations idéologiques nommément libertaires (féminisme, écologie, courants autogestionnaires, marxistes antiautoritaires, etc.) Ce nouveau projet ferait rupture avec les traits négatifs développés dans certains milieux libertaires : dogmatisme, sectarisme, repli entre convaincus, passéisme, coupure avec le réel, désorganisation chronique...
Présente dans une trentaine de villes, AL regroupe notamment des militant(e)s actifs dans les mouvements sociaux et syndicaux. Elle publie chaque mois le journal Alternative libertaire et, trois fois par an, la revue de réflexion Débattre. AL défend la nécessité d’une intervention collective et donc d’une organisation spécifique libertaire. Ses modalités sont celles du fédéralisme libertaire et de l’autogestion : liberté d’expression des membres d’AL dans les mouvements sociaux (refus de toute logique d’entrisme ou de fraction de type léniniste) ; autonomie des collectifs locaux ; expression libre, interne et externe, des oppositions ; détermination de l’orientation générale d’AL par des coordinations et des congrès où les décisions se prennent, selon les cas, au consensus ou au vote majoritaire, les collectifs et les militant(e)s fixant ainsi le mandat impératif des diverses commissions nationales.
AL se définit comme un courant « unitaire » en direction des courants critiques et des libertaires : recherche du dialogue et des confrontations politiques, unité pratique à chaque fois que cela est possible, notamment à la base ou par thème, participation aux mobilisations unitaires. Ses militant(e)s et collectifs s’engagent aujourd’hui dans les démarches qui tendent à une « unité des libertaires » comme ils ont tenté de le faire régulièrement depuis la constitution de l’UTCL dans les années 70.
La stratégie d’AL repose sur l’auto-émancipation et l’auto-organisation des acteurs des mouvements sociaux : ce sont les luttes à la base, directes et massives, qui permettront de changer la société. Autogestion des luttes, revendications alternatives à la logique capitaliste : dès le début des années 80, l’UTCL puis AL ont mis en avant une démarche de contre-pouvoirs des mouvements sociaux, opposée à celle de la gestion libérale de la gauche réformiste, et susceptible de préparer des ruptures révolutionnaires à venir.
Refusant de poser le courant libertaire comme une « avant-garde » isolée dans sa tour d’ivoire, AL défend la perspective d’un « grand mouvement anticapitaliste et autogestionnaire » où les libertaires seraient actifs, mais aux côtés de beaucoup d’autres. Cette stratégie a pu se concrétiser dans les années 90 grâce à l’émergence de nouveaux mouvements sociaux que les militant(e)s d’AL ont soutenus et qu’ils ont même parfois contribué à initier : création des SUD, mouvements des chômeurs et des mal-logés, marches européennes contre le chômage, soutien aux sans-papiers, etc. L’affirmation de nouvelles pratiques syndicales, sous des formes autonomes (de type SUD ou CNT) ou s’exprimant dans des organisations existantes (plus souvent qu’hier dans la CGT), et leur articulation avec les associations de luttes, permettent, selon les militant(e)s d’AL, de poser les termes d’une « alternative politique » (au sens non institutionnel) portée par les mouvements sociaux. D’où les efforts consacrés aux convergences des luttes ou à l’autonomie du mouvement social.
Durant longtemps les militant(e)s d’AL firent de cette participation aux mouvements sociaux leur priorité absolue. Depuis leur congrès de Paris (avril 2000), ils entendent, sans abandonner cette participation, contribuer à la « visibilité » d’une expression libertaire. D’où le passage du journal Alternative libertaire dans les kiosques en avril 2001, une fête annuelle les 1er mai, un journal mural, un site Internet, des campagnes d’affiches et de tracts, l’élargissement d’un cercle de soutien, les Ami(e)s d’AL...
Enfin AL participe à la constitution du réseau Solidarité internationale libertaire, où se retrouvent des organisations anarchosyndicalistes et communistes libertaires telles que la CGT (Espagne), la FAU (Uruguay), la FAG (Brésil), la SAC (Suède), l’OSL (Suisse), l’ORA tchèque, etc.
Édith Soboul
Alternative libertaire, BP 177
75967 Paris cedex 20
www. alternativelibertaire.org