Certains des passages les plus célèbres de L’Unique et sa propriété sont ceux où Stirner exprime avec virulence le refus d’endosser une cause et de s’engager durablement en faveur d’une conception du bien, de la justice ou de la vérité. L’individu stirnérien se caractérise non seulement par le rejet des injonctions extérieures – notamment celles qui l’incitent à se sacrifier pour un idéal – mais aussi par une méfiance tout aussi forte envers les règles de conduite qu’il se donne à lui-même : les décisions que l’on prend, les promesses que l’on fait, les maximes éthiques dont on se dote, n’ont aucune valeur pour le Moi présent, de même que celui-ci ne saurait contraindre son Moi futur. Nul n’est tenu d’obéir à ce qu’il a été, seule compte la fluidité de l’être, la préservation de ce « rien créateur » qui ne se soumet à aucun maître, y compris si ce maître est une version antérieure de lui-même.
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