Cette pratique sociale que l’usage courant appelle confusément « la science » a des conséquences majeures sur nos vies, pour le meilleur et pour le pire. Il s’agit d’un ensemble de réalités diverses : méthodes, savoirs, techniques, institutions, interprétations du monde, etc.
Pour y voir clair au-delà du brouillage entretenu dans l’opinion publique par divers courants très actifs (postmodernes, religieux, plus ou moins ésotériques, etc.), le présent numéro invite à réfléchir dans trois directions.
Dans la première direction, « Inquiétudes face à la science », on analyse quelques exemples de soumission de « la science » aux intérêts des dominants, puis on distingue entre les bonnes et les mauvaises raisons d’avoir « peur de la science ».
Dans la deuxième direction, « En quête d’identité », ce sont d’abord des compagnons scientifiques qui dégagent ce qui, à leurs yeux, est à la fois le propre de la démarche scientifique et un outil indispensable aussi bien dans le domaine des réalités sociales ou individuelles que dans celui des réalités physiques ou biologiques.
Ils dénoncent le conservatisme foncier de la plupart de ceux qui prétendent accéder à de véritables savoirs par « d’autres » moyens que l’objectivité scientifique ; ils distinguent entre description scientifique et réductionnisme, entre jugements de réalité et jugements de valeurs, entre objectivité et neutralité ; ils posent l’objectivité comme une de leurs valeurs les plus générales.
Ensuite, d’autres compagnons contestent, plus ou moins radicalement, ces distinctions et cette prétention à l’objectivité, soit au nom d’une conception globale de la signification, de l’intentionnalité, comme acte social irréductible au biologique, soit au nom d’un monisme radical, celui de la subjectivité absolue.
Dans la troisième direction, « Vers une autre politique de la recherche », on propose des moyens pour orienter la pratique scientifique dans l’intérêt de tous : formation des chercheurs à réfléchir sur les enjeux extrascientifiques de leurs disciplines, information des non-chercheurs, dialogue entre les uns et les autres sur le mode de la complémentarité, modèles de prise de décision collectives.
En « transversales », on réfléchit sur les pratiques anarchistes actuelles dans la mesure où elles ont fait leur deuil d’une certaine idée de la révolution, sur les leçons générales qu’inspire l’échec des révolutions du xxe siècle et sur l’effort constant pour concilier dans nos luttes les moyens et la fin.